Mission 3 : Parente

Ça serait un roman sur la filiation et la parentalité comme il en existe certainement des palanquées. Comble d’originalité, ça tenterait de mettre en regard la construction d’un humain et la gestation d’un texte, ou l’inverse. Ce grand fourre-tout hautement existentiel permettrait de se balader dans les méandres de l’enfance et de sauter des émerveillements minuscules aux descriptions épiques. Je pourrais continuer à croquer des saynètes rigolardes du quotidien ou à me complaire dans les tragédies les plus sombres mêlée de sueurs et de larmes… (comme par exemple l’exploration des effets de la fatigue sur la capacité à percevoir et le tragique, et le rigolard.)

On y croisera sans nul doute des enfants flippants qui disent qu’ils ont prendu des Turcs, et des passages richement documentés sur la procrastination.

Pour l’instant, ça fait 14 000 mots de matériau brut et synthétique, 7000 Écrire, 7000 Parente. Il manque l’histoire, les personnages, et la machine à filer le bon coton pour habiller tout ça.

Exemple d’extrait :

J’ai la joie comme activité, comme réflexe, la joie qui se libère à chacun de mes mouvements maladroits : regardez-moi je marche, et je porte mon seau, trop cool ! La joie d’avoir ouvert un placard et de pouvoir sortir une à une les chaussures, et sous mes doigts les découvertes, les matières, les formes, les poids et le dessin, me repaître du nouveau pour en sortir grandi, créer mes connections et mes associations. Quand on me sort, mon regard se pose sur les gens, je les détaille de façon précise, analytique, intéressée. À mon âge, je sais à quel point chacun est passionnant, à quel point chacun est différent. Je regarde les gens et je cherche le contact, je souris, je fixe, je crée un lien, ça a l’air tellement plus dur par la suite, pour les plus grands, alors que c’est la base, l’essence, la source de la vie, ma première action quand je suis venu au monde, souffrir ok d’accord, mais de suite après chercher la chaleur, l’odeur, l’autre, de suite, faire partie de l’assemblée des vivants, ne pas tomber dans le vide, se raccrocher à la chair, se suspendre aux regards, s’ancrer dans les si partagés espaces sonores. Je suis la joie et je suis le contact. Pourtant, tout le monde peut vivre sans moi, je ne suis la raison de vivre de personne, personne ne devrait être la raison de vivre de quiconque, chacun est à la fois sa propre raison de vivre et sa propre absence de raison de vivre, et chacun traverse la vie en se faisant une raison de cette dualité retorse, en en négociant les virages. Je ne sers à rien, peut-être que personne ne sert à quelque chose, mais parfois je croise un vieux, un jeune, n’importe qui dans un supermarché qui s’illumine sur mon passage, juste parce que depuis ma poussette je l’ai regardé, simplement, naturellement, je l’ai vu et il en a été plus vivant l’espace d’un instant. Je ne sais pas faire grand chose, mais je sais considérer. Peut-être qu’il m’a souri sans faire trop exprès, comme un des ces réflexes issus du fond des âges. Pour s’assurer qu’il y aurait bien de la vie, après. 

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