Marche pour le climat, 9 mai 2021, Jean-Jaurès, Toulouse.

Attendre que ça démarre, commencer à lire les pancartes à droite à gauche, quelques tracts choisis conservés pour plus tard. Se rendre compte que faire tenir une baguette chinoise avec des chutes des autocollants de magazines jeunesse (par lesquels je remplace toute utilisation du scotch) pour mieux porter mon affiche en carton, ça ne marchera pas. Se consoler en voyant que celles autour qui tiennent au scotch, c’est a minima du gros scotch de chantier, et que la majorité des cartons se contentent d’être brandis. Se réjouir devant les prévoyants qui fonctionnent en fil-bambou-tissu, rien de tel que la bonne vieille couture.

Un petit peu envie de faire pipi.

On avance, avec la fanfare. Comme les dernières fois, pas mal de vélos glissés dans le cortège. Des gilets jaunes sur lesquels je lis « Pas d’essence, mais j’avance, Carfree France » : premières notes prise au dos de ma pancarte (et j’ai bien fait : leur site met actuellement en valeur un spot bruxellois très rigolo).


Je retrouve les classiques : Les calottes sont cuites, The chaud must NOT go on, There is no planet B.


On continue. Boulevard Lazare Carnot. Un scientifique, a priori un peu plus écoutés que celleux d’aujourd’hui, à l’origine avec Monge de l’école Polytechnique. Les cuivres ont été remplacés par des percussions. Sur ces rythmes, comme les étudiants de l’X, comme tant d’autres, par ailleurs, quelqu’un propose l’indispensable du rituel et des communions, la nécessité du faire ensemble, pour rallier et relier nos cerveaux d’animaux sociaux : on s’accroupit tous et toutes… et on se relève revigorés. On se donne du sens, comme dirait Bohler.

On est foule, et full d’idées : « L »humanité aurait bien besoin d’une Terre happy. »
ça parle de choses capitales, comme  » L’argent ne se mange pas », le traditionnel « Moins de banquiers, plus de banquise », qu’on peut relier avec ce cynique mais percutant « Si le climat était une banque, on l’aurait déjà sauvé. » Plus loin, je vois un grand carton sur lequel est collé un planisphère, barré d’un joli « Pour leurs profits, ils vendraient Terre et Mer ».

Cela fait écho avec l’écoféminisme qui s’affiche beaucoup aussi avec, entre autres, « Sorcières en colère, arrêtez de faire saigner la terre ». Ou une cape en tissu « Vous traitez la terre comme nos vagins. »

Expression populaire oblige, je croise quelques coucous aux représentants du peuple : « Il y a plus de pingouins au gouvernement que sur la banquise », « Recyclez vos déchets, n’en faites pas des ministres », ainsi qu’un joli constat en lettres colorées : « Ta loi c’est de la poudre de Perlimpinpin », complété par le « Sans filtre -> 100 filtres », « Député.e.s, loi climat, sortez-vous les doigts », ou encore « J’aime la vie ! Visiblement pas toi avec la loi climat ».

Le tout assez bien résumé par un « Quelle indignité », référence ironique (ou involontaire, après tout le porteur, qui s’est exprimé à la fin, était bien jeune en 2016) au premier président français condamné à de la prison ferme.

Assez envie de faire pipi. Les toilettes croisées sont HS.

Je croise le célèbre « la terre, nous l’empruntons à nos enfants » légèrement corrigé un peu plus loin par « Pensons un peu à la planète qu’on laissera derrière nous à la Reine d’Angleterre. »

Parmi les nombreuses solutions qui courent, celle de L214 : « Qu’est-ce qui dépense le plus d’eau ? Manger de la viande ou prendre 730 bains par an ? »
Ce qui fait écho à un autre classique des marches climat : « Ta planète, tu la veux bleue ou bien cuite / saignante ? »
Autres pistes d’actions : « Bali c’est fini, Albi c’est joli », « Moins procréer, une solution pour la planète », « Arrêtez d’être un mouton, devenez l’abeille qui fait de sa ruche un monde meilleur »

Bon c’est pas que, mais la marche est finie, et décidément, la nature m’appelle de ses besoins naturels.

Une fois partie en espérant trouver des sanisettes fonctionnelles, je patiente à Esquirol. Une fois à l’intérieur, je n’arrive pas à fermer la porte. Pas de bouton de fermeture de porte, mais un mécanisme obscur cependant. Après plusieurs tentatives (patienter sans rien toucher… tenter d’utiliser les poignées…), rien à faire. Aujourd’hui, je suis inapte à faire pipi dans la technologie.

Parmi les pancartes, il y avait « Laisse bé-tonne Béton », « Du souffle de l’air faisons renaitre une forêt primaire », « Comme un poison dans l’eau » et « Que la forêt soit avec toi ! »

Là, en effet, je rêve d’être en plein cœur d’une forêt où j’aurais l’embarras du choix du buisson où me planquer pour que mes liquidités enrichissent l’humus sans croiser béton ni macadam, et encore moins ce fichu plastico-métal de sanisette.

On est bien peu de chose, et mon amie la rose n’a pas ces embarras.

Je remonte les rues, et je fais la bêtise sur le trajet de convoquer Smart Phone qui n’a de smart que le prénom, puisque quand je laisse ma tête taper contre le Mur de la presse et sur Google actu, voir ce que voient les Jean, il me sape direct les bénéfices d’un requinquement psycho-climatique collectif.

À 16h30, j’y découvre en effet que visiblement les marches pour le climat n’existent juste pas (entre 50 000 et 115000 manifestants tout de même), mais qu’il y a eu un rassemblement à Avignon de mille personnes, et que le chien de Barack Obama est mort.

Je sais bien, pourtant, qu’avec un Bolloré qui fait à la fois médias et transports routiers, ou un Xavier Niel médias et numérique, ou d’autres encore de toute cette clique qui collecte nos investissements dans la particule, il n’y a vraiment pas de quoi être surprise, mais que voulez-vous, l’optimisme…

Je repense aux autres pancartes, qui mettaient le changement au centre :

 » La nature en a marre de l’homme, changeons »

« Pensons le changement au lieu de changer le pansement »

« Si on change pas, c’est Terreminé »

« Le climat change, pourquoi pas nous ? »

« État, citoyens, ensemble pour de meilleurs lendemains »

En quittant la marche, j’ai entendu un monsieur demander à un CRS ce qu’il se passait : on lui a répondu que c’était « une marche pour le climat, enfin contre les dégâts, le réchauffement climatique », en hésitant sur les mots. Comme si une manifestation ne pouvait se définir qu’à travers le contre.

J’ai cueilli sur le parcours un tract de gens explicitement POUR un « 2022 vraiment en commun », « unité et alternative pour 2022 ».


Je remonte. Les cafés sont fermés. Mon périnée aussi.
On ronge notre frein. On attend le feu vert.

Heureusement, je croise un bâtiment public, salvateur. Un lieu d’accueil, d’informations, de refuge. Ouvert le dimanche après-midi ! Avec des toilettes !

Je revis, je ne suis que joie.

Ya pas à dire, rien de tel que les médiathèques pour sauver le monde.

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