L’accordéon de Tiersen est quand même un engin formidable, une espère de virevoltant qui enfile comme des perles, les uns sur les autres, les tressautements redondants de nos pauvres palpitants, et ses instruments jouets, aériens et légers, cristallins cristallisent nos petites anxiétés, par les petits bonds fiévreux des notes comme des mailloches, leurs envolées rapides, comme mille petits bâtons sur le chemin caillouteux de la vie, avec une jambe qui dérape parfois, une rotule qui glisse un peu en contrebas au hasard d’un galet, et par dessous la chaussure qui récupère, qui plante du pied qui assure le contrecoup, qui stabilise, comme la lame de métal vient rassurer le son par sa présence même, imperturbable, au même endroit, au bon endroit, comme une assise assortie d’une boussole, comme un fauteuil autour des bras duquel volèterait un pinson sans jamais savoir où réellement se poser, où réellement se faire embrasser, et dans cette chanson dont je ne me souviens plus du titre car ça aurait tout aussi bien pu être une autre, ce sont les violons qui s’emballent, qui redondent, qui se chassent les uns les autres, et après ça, que faire, en garder la matière dans un coin de l’oreille, se mettre à l’abri des Murail, y rejoindre Sauveur et fils, quelques pages, quelques cacahuètes, et advienne que lira.