Lors d’une journée des claviers au conservatoire, à l’occasion d’une audition d’amateurs, deux joueurs de marimba ont commencé « Hey Jude ». Les descendants des petits Scarabées se sont mis en formation, notes rebondissantes sur les lattes de bois, offrant ce mélange réconfortant d’air connu et d’exotisme.
Un peu plus tard, « Hey Jude » s’est déployé, ou pour ainsi dire s’est soulevé : parmi les jeunes joueurs sagement rangés sur des chaises tout autour de la scène, fondus contre le rideau, plusieurs se sont levés, ont gagné un clavier, et ont rajouté leur pierre sur le chemin de l’harmonie, leur patte à la partition générale.
J’avais éprouvé la même émotion qu’en vélo, lorsque je rejoins une manifestation et que je vois tout autour sur le trajet des gens dispersés marcher sur les trottoirs dans la même direction, grappes ou électrons, individus libres, qui choisissent de mettre en sourdine leur intérêt immédiat pour, à partir de leur pelote emmêlée, de leur vie suspendue à un fil, participer à confectionner ce vaste tissu social. L’esthétique de la convergence incarnée dans sa diversité.
Tissu social, patchwork irisé, chaud et mouvant comme une nappe des sens, nappe d’essence sur laquelle il conviendrait, comme dit Nicolas Mathieu, de ne pas jouer avec les allumettes.